Pourquoi se doter d’une convention d’actionnaires?

La convention d’actionnaires prévoit les droits et les obligations des actionnaires selon différentes situations susceptibles de se produire au cours de l’existence d’une société. S’il est vrai que les lois régissant les sociétés établissent, de façon générale, une structure commune à toutes les entreprises, elles ne le font pas jusque dans les moindres détails. Une convention d’actionnaires devient alors un instrument inestimable pour prévenir les conflits et régler ceux qui se présentent.

La convention d’actionnaires est essentielle au bon fonctionnement d’une société et permet de solidifier l’engagement de ses actionnaires. La convention d’actionnaires vise également à :

  1. Assurer le maintien de la détention proportionnelle d’actions entre les actionnaires
  2. Conserver le caractère « privé » de la société en empêchant des tiers d’en devenir actionnaires sans le consentement des parties
  3. Assurer un marché pour les actions
  4. Empêcher qu’un actionnaire minoritaire ne soit lésé par les décisions ou les agissements d’un actionnaire majoritaire
  5. Régler d’avance certaines questions potentiellement litigieuses dans l’administration de la société et finalement
  6. Conférer aux actionnaires le pouvoir décisionnel vis-à-vis de certaines activités de la société.

Les principales dispositions de la convention d’actionnaires

Les clauses qui peuvent être incorporées dans une convention d’actionnaires sont multiples et permettent d’appréhender et de prévenir certaines situations épineuses. En voici quelques-unes.

  1. Les transferts d’actions

    Certaines clauses de la convention d’actionnaires régissent les transferts d’actions telles que :

    • les clauses imposant l’obligation de vendre ou l’option d’acheter les actions des autres actionnaires dans certaines situations précises (l’invalidité, la faillite personnelle, la retraite fixée à un âge déterminé, le décès, le retrait volontaire de la société, le détournement de fonds de la société, le non-respect d’une clause de non-concurrence ou de non-sollicitation);
    • la clause accordant le droit de premier refus : cette clause vise à obliger l’actionnaire-vendeur à offrir ses actions aux co-actionnaires, au prorata de leur détention d’actions, avant que cet actionnaire-vendeur ne puisse les vendre à un tiers ou encore à l’un d’entre eux;
    • la clause d'entraînement (piggyback) : cette clause est de mise dans les conventions entre un actionnaire majoritaire et un ou plusieurs actionnaires minoritaires. Par le biais d’une clause d’entraînement, les actionnaires minoritaires pourront exiger, comme condition au droit de l’actionnaire majoritaire de vendre ses actions à un tiers, que ce dernier achète également leurs actions, et ce, aux mêmes conditions que celles qui sont offertes à l’égard des actions de l’actionnaire majoritaire.
    • la clause achat-rachat (shotgun) : cette clause permet à tout actionnaire d’initier un processus d’achat de la participation du co-actionnaire par lequel un co-actionnaire doit i) accepter l’offre d’achat de l’offrant; ou ii) présenter une contre-offre d’achat comportant les mêmes termes et modalités que ceux qui sont contenus dans l’offre d’achat de l’offrant.
  2. Les modalités d’achat des actions

    Une convention d’actionnaires peut aussi résoudre des problèmes découlant des clauses d’achat-vente d’actions, en déterminant :

    • qui sera l’acheteur des actions : la société, les actionnaires, ou des tiers;
    • les modalités de paiement (comptant, versements à terme, etc.);
    • une assurance-vie ou autres assurances pour garantir le paiement des actions.
  3. L’évaluation des actions

    La convention d’actionnaires peut envisager diverses méthodes pour évaluer les actions, pouvant varier selon les circonstances menant au rachat, comme :

    • l’évaluation à la valeur aux livres;
    • l’évaluation à la valeur aux livres « rajustée »;
    • l’évaluation à la valeur de liquidation;
    • l’évaluation à la valeur de rendement;
    • l’évaluation à la valeur établie par un tiers, etc.
  4. Les clauses de vote

    Les actionnaires peuvent envisager diverses modalités de vote par l’énoncé de clauses portant sur :

    • l’élection des administrateurs;
    • la nécessité d’un vote par majorité spéciale dans certaines situations;
    • la création d’un accord de mise en commun « pooling agreement » (transfert des actions à un mandataire-dépositaire qui s’engage à exercer le droit de vote et à administrer les actions conformément aux directives des actionnaires signataires de la convention d’actionnaires);
    • la création d’une convention de vote fiduciaire « voting trust » (transfert des actions à un mandataire-dépositaire qui s’engage à exercer le droit de vote et à administrer les actions à sa discrétion).
  5. Les clauses de gestion

    Les actionnaires peuvent, par l’intermédiaire de ces clauses :

    • déterminer les contributions de chacun et chacune;
    • partager les revenus;
    • prévoir le remboursement des dépenses;
    • répartir les tâches des actionnaires;
    • prévoir des modalités lors de l’invalidité d’un des actionnaires;
    • assurer l’exclusivité, la confidentialité et la non-concurrence de la part d’un actionnaire qui quitte la société;
    • régir les vacances.

Il est tentant de penser qu’une convention d’actionnaires contient à peu près toujours les mêmes clauses et qu’on peut la rédiger soi-même. Bien que les concepts soient clairs, leur application est beaucoup plus complexe en raison de multiples facteurs. Chaque société a une réalité d’affaires différente et c’est pourquoi la convention d’actionnaires doit être adaptée à cette réalité précise.

Par exemple, que faire si l’un des actionnaires n’est pas assurable, car il est plus âgé ou est atteint d’une maladie grave? Ou encore, que se passera-t-il si l’assurance-vie des actionnaires vaut 500 000 $, mais que la valeur d’une action est établie à 200 000 $? Qui bénéficiera du 300 000 $, la société ou la succession?

Voilà pourquoi il est préférable de consulter un avocat ainsi qu’un fiscaliste afin de bien cerner les besoins de votre société et de comprendre tous les risques associés aux clauses de la convention d’actionnaires. Les experts du cabinet Lavery vous conseillent de rédiger la convention d’actionnaires dès le départ, quand tout va bien, et de la mettre à jour en cas de changements importants dans la société ou à l’arrivée de nouveaux actionnaires.

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Auteur

  • Simon Clément

    Associé, Associé directeur (bureaux de Québec et Trois-Rivières) et Avocat

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